Récit de la bataille qui opposa la valeureuse armée des bagnérais commandée par Jean-Philippe le Bel, seigneur des Coustous à celle de Catherine III la Petite, marquise de la Chausse et commandant de l'armée des racailles du Marquisat.
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Nous partimes tous six par un beau jour frileux
Affronter l'ennemi qui nous guettait anxieux.
La première bataille fut menée rondement
Et le blanc chevalier pourfendit le manant.
La peau de castor qu'il vendit chèrement,
Fut offerte à la marquise qui s'en fit des gants.
Le chevalier noir dans un sublime élan,
Estoqua l'adversaire en quelques instants.
Le troisième larron en fit tout autant,
Et reçut de la marquise l'adoubement.
Les trois autres perdirent malheureusement,
Il s'agissait d'un vieux, d'une femme, et d'un enfant.
Puis vint l'heure du second combat,
Le vent fraichit, le brouillard tomba.
Les vaillants chevaliers sous leurs frèles armures
Avaient tout de même encore fière allure.
La lice se recouvrit d'un voile givrant,
On entendait au loin sonner l'olifant.
Il fallut courageusement reprendre les armes,
Et combattre encore dans le sang et les larmes.
Le chevalier noir était devenu vert
Et claquait si fort des dents qu'on les eût crues en fer.
Les boules s'entrechoquaient dans un bruit d'enfer
Mais l'ennemi vint à bout de ce bras légendaire.
La marquise et le grison s'inclinèrent bientôt,
Après s'être défendus unguibus et rostro.
Seul le chevalier blanc épaulé de l'enfant
Sauva l'honneur en gagnant brillamment.
La froidure s'intensifiait inexorablement,
Il fallait livrer l'ultime engagement.
Le sol était jonché de cadavres sanglants,
Les vautours tournoyaient inlassablement.
La marquise passa en revue ses servants,
Tous étaient vivants, peu restaient fringants.
Ils reprirent le combat courageusement,
Ce fut la plus rude gigantomachie de tous les temps.
Les troupes montraient des signes de faiblesse,
Mais revenaient à la charge sans cesse.
On brisa quelques os, on broya quelques noix,
Dans un baroud d'honneur de bon aloi.
La marquise manqua mourir d'épuisement
Mais continua à parler tout le temps.
Cependant il fallut se rendre à l'évidence,
Déposer les armes et faire repentance.
Cette bataille épique méritait bien
Que tout un chacun s'en souvint.
Voici pourquoi je vous l'ai contée,
Pour qu'elle entre dans la postétité.
Plaudite cires
Gloria victis !